Portraits perdus


Antinoopolis, fragment d'une statue d'Antinoüs, en marbre blanc. Trouvée pendant l'"Expédition d'Egypte" (1799-1801) et transportée au Caire, où elle se perdit. D'innombrables fragments de statues similaires, délibérément mutilées, jonchaient encore le sol à cette époque, au pied des colonnes élevées de chaque côté de la rue principale d'Antinoopolis. Au milieu du 19ème siècle, quasi tout morceau de marbre fut convertit en chaux pour construire une usine à Rhoda, sur l'autre berge du Nil. En conséquence, Antinoopolis disparut de la surface de la terre. «Les formes pures et juvéniles respirent pourtant une certaine vigueur ; autant qu'on puisse en juger, l'attitude était d'une mollesse pleine de grâce» (Edmé-François Jomard, 1818)

Berlin, Altes Museum, Inv. N° (Conze) 365. Provenant de la collection Polignac. Non exposée. Acquise pour Frédéric II le Grand en 1742. Perdue vers la fin de la Seconde Guerre mondiale. «Im Ausdruck und in der Anordnung des Haares erinnert dieser Kopf hauptsächlich an den kolossalen Mondragone Antinous» (Eduard Gerhard, 1836)
Egyptomania
L’égyptomanie, c’est la fascination du monde occidental par la culture et l’histoire de l’Egypte ancienne. Bien que cette fascination trouve son origine peu après l’incorporation de l’Egypte dans l’empire romain, elle se rapporte plus précisément au regain d’intérêt qui prit corps en Europe à la fin du 18ème siècle, et que fut considérablement développé par la « Campagne d’Egypte » (1798-1801) et se prolongea jusqu’aux premiers temps du 20ème siècle.
Dans ce chapitre, nous documentons l’impact du fameux Antinoüs égyptien du Vatican sur les arts plastique et graphique.

Collection privée Franco Maria Ricci. Buste moderne en marbre noir, réplique de la statue d'Antinoüs-Egyptien en marbre blanc conservée au Vatican (Inv. N° 22795). L'exacte similitude de la calantica, la poitrine charnue, les épaules hautes l'apparent sans équivoque à cette statue des plus célèbres, qui a été reproduite en nombre incalculable de répliques dès la fin du 18ème siècle; sa popularité a atteint son apogée dans le premier quart du 19ème siècle, quand la mode de l'"Egyptomanie" envahit toute l'Europe et l'Amérique du Nord.

Collection privée. Tête antique d'Antinoüs sur un buste moderne. Trouvée en 1769 dans le "Pantanello" de la Villa Hadriana. Propriété de la maison Lansdowne de 1772 à 1995, quand le buste fut alors acquis par un collectionneur anonyme. «The calantica suits the character of the head admirably» (Adolf Michaelis, 1882

Collection privée. Buste d’Antinoüs, portant coiffure royale égyptienne, en marbre gris, par Henryk Ittar (1773-1850), environ 1800. Hauteur 63,5cm. Vente Sotheby's Londres, 9 décembre 2005. Cette version d’Antinoüs était destinée à être placée dans la Tombe des Illusions, un temple situé dans le jardin romantico-classicisant d’Arcadie conçu par la Princesses Helena Radziwill (née Przezdziecka), créé dans les dernières décennies du 18ème siècle à Nieborow (Pologne).

Gatchina (à 45 km au sud de Saint Petersbourg), Musée d’Etat. Dans le Salon Blanc du palais de Gatchina, situé à 45 km au sud de Saint Petersbourg, se trouvent deux statues en marbre noir inspirées de la statue d’Antinoüs-Osiris des Musées du Vatican. Elles ont été sculptées par Domenico d'Angeli et Carlo Albaccini et placées dans ce palais par son premier propriétaire, le comte Grigory Grigoryevich Orlov (1734-1783). Les statues avaient été achetées en Italie par le mécène russe, Ivan Ivanovich Shuvalov (1727-1797), et parvinrent à Saint Petersbourg en août 1769. Catherine II les offrit à son favori, le comte Orlov, ainsi que le domaine de Gatchina. A la mort de celui-ci, le palais revint à la famille impériale.

Paris, Musée du Louvre, A 22. Département des Antiquités Egyptiennes, Sully, 1er étage. Jambes d’une statue de Ramsès II, complétée et restaurée en statue d’Antinoüs. Provient de la collection Albani : l’ensemble de la collection a été confisqué par les troupes française lors de l’occupation de l’Italie à la fin du 18ème siècle. Photo : Jastrow


Victoria & Albert Museum. N° A.4-1974. Statuette en rosso antico, hauteur 33 cm. Origine italienne, autour de 1800. Léguée par le 7ème Duc de Wellington. Exposée en salle 101.

Collection privée. Un marbre d’Antinoüs vendu aux enchères par Bonhmas, Londres, 21 janvier 2008. Autrefois dans la collection Naim Attallah, l’ancien CEO de Asprey Holdings Ltd. Ce type particulier, avec le tronc d’arbre comme support de la jambe, est probablement inspiré de la paire de statues d’Antinoüs en marbre bleu turquin dues à Pierre-Nicolas Beauvallet (1750-1818), datant d’environ 1810, et actuellement exposées au Musée Marmottan, Paris (cf. Jean-Marcel Humbert (édit.), Egyptomania, 1994, 269-71, n° 154-5, fig.). Cette paire, à son tour, était inspirée des représentations d’Osiris-Antinoüs, la plus connue étant la statue en marbre blanc trouvée en 1739 dans le Canope de la Villa Hadriana.

Paris, Rue de Sèvres, 42, Fontaine du Fellah. En 1806, François-Jean Bralle (1750-ca.1832) s’inspira de l’Antinoüs égyptien du Vatican (qui, de 1798 à 1815, s’est trouvé à Paris suite aux pillages perpétrés par le régime napoléonien) pour dessiner cette fontaine que Pierre-Nicolas Beauvallet (1750-1818) réalisa peu après (1809). La statue se détériora rapidement et fut remplacée en 1844 par cette copie due à Théodore Gechter (1796-1844), visible aujourd’hui. En 1831, Joseph Théodore Oudet (1793-1865) s’inspira à son tour de cette fontaine pour concevoir la sienne, plus conforme à l’art égyptien antique, construite en 1831 à Mauvages (France, départ. Meuse).

Mauvages (France, département de la Meuse), Fontaine du Déo. Ce lavoir, que son emplacement dans la petite ville de Mauvages étonne, a été construit en 1831 par Théodore Oudet (1793-1865). Il est plus fidèle au style égyptien antique que ses modèles parisiens; par contre, comme dans la « Fontaine du Fellah », Antinoüs y figure toujours un porteur d’eau.


Collection privée. Paire de statues en marbre noir, selon la statue d’Osiris-Antinoüs du Vatican, vendue aux enchères par Bonham à Londres, le 23 janvier 2008. Dues à Louis Loys Potet (1866- ?), fin du 19ème siècle. Hauteur : 104 cm.